12 août 2012

Jules Renard, sur lui-même


« Je n'ai réussi nulle part. J'ai tourné le dos au Gil Blas, à l'Echo de Paris, au Journal, au Figaro, à la Revue hebdomadaire, à la Revue de Paris, etc. Pas un de mes livres n'arrive à un second tirage. Je gagne en moyenne vingt-cinq francs par mois. Si mon ménage reste pacifique, c'est grâce à une femme douce comme les anges. J'ai vite assez de mes amis. Quand je les aime trop, je leur en veux, et, quand ils ne m'aiment plus, je les méprise. Je ne suis bon à rien, ni à me conduire en propriétaire, ni à faire la charité. Parlons de mon talent. Il me suffit de lire une page de Saint-Simon ou de Flaubert pour rougir. Mon imagination, c'est une bouteille, un cul de flacon déjà vide. Avec un peu d'habitude, un reporter égalerait ce que, plein de suffisance, j'appelle mon style. Je flatte mes confrères par lettres et je les déteste à vue. Mon égoïsme exige tout. Une ambition de taille à regarder par dessus l'Arc de Triomphe, et ce faux dédain des médailles ! (...) et malgré cela, il y a, ma parole, des quarts d'heure où je suis content de moi. (...) »

Jules Renard, extrait des morceaux choisis de son Journal 1887-1910, daté du 29 novembre 1894 ; éditions Babel.

3 commentaires:

  1. Une autre vision de Jules Renard... Commencer à lire sa biographie avant toute chose ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je ne sais pas s'il existe une biographie intéressante ; personnellement, je ne connaissais quasiment rien de sa vie avant de lire les morceaux choisis de son journal, et il m'a paru que c'était une très bonne entrée en matière. Il est introduit par une préface assez intéressante et une chronologie de la vie de Renard, ce qui m'a semblé bien suffisant.

      Supprimer
  2. La seule véritable biographie de Jules Renard est justement son journal. C'est pour cela qu'il l'a écrit et il le dit lui-même.

    RépondreSupprimer

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...

Articles les plus consultés cette semaine