En préambule, il ne sera pas question dans cet article de Semmelweis – la thèse soutenue par Louis-Ferdinand Céline en 1924 à l'issue de ses études de médecine – qui complétait le très court pamphlet Mea culpa dont il est reproduit, ci-contre, la couverture de l'édition originale. Jamais republié dans cette version depuis sa parution en décembre 1936, ce texte d'une petite vingtaine de pages écrit par Céline au retour de son voyage en U.R.S.S. est intégré depuis 1986 au septième tome des Cahiers Céline, publié chez Gallimard, qui sera traité dans son ensemble ultérieurement.
1936 est une année charnière dans le parcours de Céline. Mort à crédit, son second roman, est paru en début d'année, et contrairement à Voyage, la plupart des critiques l'éreintent pour des raisons que Céline ne comprend pas (près de 80 ans plus tard, on peut du reste toujours s'en étonner). Animé d'un esprit revanchard, Céline délaisse pour de nombreuses années le roman, pour se consacrer à un nouveau genre, moins contraignant, plus instantané, et, aussi, plus engagé : le pamphlet. Mea culpa sera le premier d'une série de quatre qui bouleverseront sans doute à jamais la perception de l’œuvre de l'écrivain.
Nettement moins controversé que les trois pamphlets suivants, Mea culpa s'en prend au mirage communiste avec l'extraordinaire violence qu'on connait à Céline ; cette brutalité lucide, mêlée d'ironie, d'absurde, de drôlerie. De son séjour à Leningrad trois mois plus tôt, l'écrivain n'a retenu que les horreurs du système communiste, et il en identifie très clairement l'origine : l'homme et son ignominie congénitale.
Bien loin de l'angélisme prolétaire qui a nourri nombre d'esprits idéalistes de son temps (même si, à l'image de Gide quelques mois plus tôt, certains sympathisants d'hier commençaient déjà à déchanter), Céline pilonne la nouvelle caste dominante de Russie, à sa manière habituelle : aucune place n'est laissée à la mesure, l'écrivain rend l'ordure au centuple. Il prend du reste sa cible à partie dès les premières lignes, avec le mépris qui est dû à sa duplicité :
« Ce qui séduit dans le Communisme, l'immense avantage à vrai dire, c'est qu'il va nous démasquer l'Homme, enfin ! Le débarrasser des "excuses". Voici des siècles qu'il nous berne, lui, ses instincts, ses souffrances, ses mirifiques intentions... Qu'il nous rend rêveur à plaisir... Impossible de savoir, ce cave, à quel point il peut nous mentir !... C'est le grand mystère. Il reste toujours bien en quart, soigneusement planqué, derrière son grand alibi. "L'exploitation par le plus fort." C'est irréfutable comme condé... Martyr de l'abhorré système ! C'est un Jésus véritable !...
" Je suis ! comme tu es ! il est ! nous sommes exploités !"
Ça va finir l'imposture ! En l'air l'abomination ! Brise tes chaînes, Popu ! Redresse-toi, Dandin !... Ça peut pas durer toujours ! Qu'on te voye enfin ! Ta bonne mine ! Qu'on t'admire ! Qu'on t'examine ! de fond en comble !... Qu'on te découvre ta poésie, qu'on puisse enfin à loisir t'aimer pour toi-même ! Tant mieux, nom de Dieu ! Tant mieux ! Le plus tôt sera le mieux ! (...) »
Ainsi commence la traque contre les illusions d'un système dont l'usage a plutôt donné raison à Céline.
1936 est une année charnière dans le parcours de Céline. Mort à crédit, son second roman, est paru en début d'année, et contrairement à Voyage, la plupart des critiques l'éreintent pour des raisons que Céline ne comprend pas (près de 80 ans plus tard, on peut du reste toujours s'en étonner). Animé d'un esprit revanchard, Céline délaisse pour de nombreuses années le roman, pour se consacrer à un nouveau genre, moins contraignant, plus instantané, et, aussi, plus engagé : le pamphlet. Mea culpa sera le premier d'une série de quatre qui bouleverseront sans doute à jamais la perception de l’œuvre de l'écrivain.
Nettement moins controversé que les trois pamphlets suivants, Mea culpa s'en prend au mirage communiste avec l'extraordinaire violence qu'on connait à Céline ; cette brutalité lucide, mêlée d'ironie, d'absurde, de drôlerie. De son séjour à Leningrad trois mois plus tôt, l'écrivain n'a retenu que les horreurs du système communiste, et il en identifie très clairement l'origine : l'homme et son ignominie congénitale.
Bien loin de l'angélisme prolétaire qui a nourri nombre d'esprits idéalistes de son temps (même si, à l'image de Gide quelques mois plus tôt, certains sympathisants d'hier commençaient déjà à déchanter), Céline pilonne la nouvelle caste dominante de Russie, à sa manière habituelle : aucune place n'est laissée à la mesure, l'écrivain rend l'ordure au centuple. Il prend du reste sa cible à partie dès les premières lignes, avec le mépris qui est dû à sa duplicité :
« Ce qui séduit dans le Communisme, l'immense avantage à vrai dire, c'est qu'il va nous démasquer l'Homme, enfin ! Le débarrasser des "excuses". Voici des siècles qu'il nous berne, lui, ses instincts, ses souffrances, ses mirifiques intentions... Qu'il nous rend rêveur à plaisir... Impossible de savoir, ce cave, à quel point il peut nous mentir !... C'est le grand mystère. Il reste toujours bien en quart, soigneusement planqué, derrière son grand alibi. "L'exploitation par le plus fort." C'est irréfutable comme condé... Martyr de l'abhorré système ! C'est un Jésus véritable !...
" Je suis ! comme tu es ! il est ! nous sommes exploités !"
Ça va finir l'imposture ! En l'air l'abomination ! Brise tes chaînes, Popu ! Redresse-toi, Dandin !... Ça peut pas durer toujours ! Qu'on te voye enfin ! Ta bonne mine ! Qu'on t'admire ! Qu'on t'examine ! de fond en comble !... Qu'on te découvre ta poésie, qu'on puisse enfin à loisir t'aimer pour toi-même ! Tant mieux, nom de Dieu ! Tant mieux ! Le plus tôt sera le mieux ! (...) »
Ainsi commence la traque contre les illusions d'un système dont l'usage a plutôt donné raison à Céline.
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