Henri Calet, comme il l'écrit dès les premières lignes dans son style vif et aéré, est né avec le siècle. Le précédent bien sûr, le vingtième. Dans son premier roman, publié en 1935, alors qu'il avait donc une trentaine d'années, Calet se raconte, lui, ses parents et leur entourage. Il raconte la France d'avant 1914, la guerre (il est alors réfugié avec sa mère en Belgique) puis l'entre deux guerres. Il regarde la société et ses congénères avec un regard d'enfant puis de jeune adulte, ironiquement naïf, il décrit les choses de la vie dans toute leur abjection avec légèreté, détachement, tout en laissant sourdre un regard critique d'une acuité et d'une puissance « céliniennes ».
Le quatrième de couverture a beau le réfuter, pour moi, il y a du Céline dans ce regard noir, à contre-courant, mais il se traduit par des mots différents. Nous ne retrouvons pas dans le style de Calet la logorrhée de Céline, pas plus que les hallucinations et la démesure. Il n'y a pas non plus de violence dans la prose de Calet. Il n'y a donc pas grand-chose de Céline me direz-vous, et pourtant, il y a malgré tout, en filigrane, un semblable dégoût des bassesses humaines, du conformisme écrasant, des vérités toutes faites et jamais vérifiées.
Mais quand Céline dégueule tripes et boyaux le monde et les hommes et se remet les doigts au fond du gosier lorsque plus rien ne semble venir, Henri Calet, lui, vomit ce monde discrètement, presque à l'abri des regards, ses remontées acides lui viennent par petits jets de bile, savamment distillés dans son interprétation faussement innocente, trompeusement apaisée.
Henri Calet est donc un homme mesuré, mais ses mots ne trompent pas pour autant. L'amour, le travail, le patriotisme, la morale, tout y passe, et avec style. Il suffit parfois de cinq ou six mots, une dizaine tout au plus, pour faire passer son message au lecteur. Des exemples ?
« (…) L'amour qu'on fait ne vaut jamais cher. (...) » (p.129)
« (…) Une blague qui n'est pas merdeuse, n'est jamais une bonne blague. » (p.137)
« (…) L'onanisme est un plaisir vraiment gratuit. Le vrai plaisir des solitaires et des pauvres. (...) » (p.150)
Et quand l'écrivain est plus prolixe, on jouit tout autant :
« (…) Les pages d'histoire immortelle, on aime bien les lire, mais les écrire et avec son propre sang c'est, tout de même, un peu différent. (...) » (p.64)
« (…) A seize ans, je faisais des poèmes la fleur aux dents. Comme vous et moi.
Bien droit sur mes pieds, mains aux poches devant un objectif absent, raide et tout verbeux j'entonnais mon cantique à la gloire de la Patrie, de la Nature, de l'Amour.
Au choix.
Le climat était propice à la poussée, au développement de pensées nobles et de sentiments élevés. J'en avais, j'en étais plein, j'en débordais.
D'un côté, les bons ; de l'autre, les méchants. Et pas de pitié pour les méchants !
Mes idées, peu nombreuses, n'étaient pas troubles.
Il a fallu du temps pour que tout sorte. Je veux parler des bonnes vérités et des lieux communs que, pendant des années, j'ai rendu en énorme dégueulade.
Ce qui était entré par l'oreille s'en alla par la bouche.
Personne n'en fut incommodé.
Le sceau de fer, les bonnes souffrances, les vieux messieurs – plus près encore : les w.-c. de l'hôtel. - … Oublié, tout cela. L'ingestion avait été massive et parfaitement assimilée.
Fils respectueux en passe de devenir le bon soldat, l'employé ponctuel, le mari aimant, le père à son tour respecté. Facile. Il ne fallait que suivre. J'étais, on le comprend, un petit bonhomme engagé sur la bonne voie. (...) » (p.103)
« (…) De grandes heures sonnaient à l'horloge de l'Histoire. Pour le retour triomphal des héros, nous étions accrochés sur une échelle à vingt francs et mêlions nos pleurs, ma mère et moi.
Ce fut un défilé mémorable.
En tête, le Roi-Chevalier et la famille royale. Tous à cheval.
« Vive le Roi ! Vive la Reine ! »
Et après, les petits soldats, tous les petits soldats qui restaient.
« Vivent les petits soldats ! »
Suivaient les nègres, les Arabes, les Canadiens, les Portugais...
« Vivent les nègres ! »
Les tanks, les canons...
« Vivent les tanks ! »
A la fin, nous avions la gorge irritée. Dans la soirée, la foule a défoncé les vitrines des vendus notoires et rasé la tête d'une douzaine de prostituées de la rue Saint-Laurent, qui avaient commercé de leurs charmes avec les vaincus. On en a déshabillé quelques-unes en pleine rue. Quelle rigolade !
Des patriotes exaltés opinèrent qu'il eût été bon de les livrer à la flamme purificatrice du bûcher, mais cette idée ne fut pas retenue.
On avait tous avalé le drapeau, avec la hampe. » (p.106-107)
« (…) A l'ombre des anciens combattants de retour au foyer, les nouvelles couches rampèrent, poussèrent et s'exténuèrent en cris admiratifs.
Il était de bon ton de s'excuser, en manière de préambule :
Je suis, je le sais, un peu jeune...
Pour un oui et pour un non, à tout bout de champ, ils nous mettaient sous le nez leurs médailles et leurs rubans. Nous dûmes écouter leurs récits de pluies de balles, de nappes de gaz, de marmitages et d'heures « H », qu'ils avaient sur le bout de la langue et que nous eûmes bientôt sur le bout des doigts.
Et par dessus la tête. (...) » (p.109-110)
« (…) C'est dans les salles de cinéma que, chaque semaine, j'allais faire ma provision de femmes. Pour mes nuits.
Un petit billet pour un petit jeune homme.
Muets, coulaient en épisodes hebdomadaires, Judex et le Masque aux dents blanches. Et les premiers petits Chaplin, dont on ne nous avait pas dit encore qu'il était génial. (...) » (p.113)
« (…) J'ai été chercher le travail qu'on rencontrait alors dans tous les coins. Notre pauvre France vivait des jours de prospérité.
Au fond d'un faubourg, près de la Seine, j'ai lu les ardoises accrochées...
« On demande... »
La fabrique de cirage « Kibrill » demandait. Je suis entré pour voir si l'on ne voulait pas d'un petit apprenti désireux de participer à la symphonie du Travail. » (p.138-139)
« (…) A sept heure du matin, la sirène chantait trois fois et nous accourions. Roues, tours, volants, bielles, fraiseuses, courroies, perceuses se mettaient en branle, sous la verrière.
Nous aussi.
Pendant huit heures et souvent plus. (…) » (p.140)
« (…) Quant à ma conscience, elle était devenue totalement aphone.
J'étais dans le chemin des pauvres.
« Poussez pas et suivez la foule. » (...) » (p.141)
« (…) Comme les autres, lavé, peigné, torché, je suivis ma petite route immonde, sous la ville dans le convoi de huit heures et demie des vendeurs, vendeuses, comptables et dactylos dirigés sur les piles de madapolam et les additions du Grand Livre. (...) » (p.167)
Calet aime aussi jouer avec la langue pour exposer son point de vue. Les expressions toutes faites sont une source presque inépuisable en la matière :
« De bonne heure, quand elle n'est pas bonne, il fallait se décoller les yeux pour entrer dans la gueule du loup du commencement d'un jour. » (p.150)
Il y a chez Calet, comme chez Céline, un goût prononcé pour le scatologique, de ses allégories et évocations merdeuses, comme Céline une fois de plus, Calet s'appuie pour remettre l'homme à sa place, dans toute son absurdité, et l'insignifiance de sa condition :
« (…) C'était une allée et venue de gens pressés et soucieux dans un bruit de ventres libérés et d'eau qui s'échappe, en trombe. Les clients avaient une tendance commune à s'enfuir de façon furtive sans attendre le coup de brosse qui fait venir le pourboire dans la soucoupe réservé à son usage.
Les hommes semblaient impatients de retrouver dehors le sentiment de leur valeur, un instant perdue dans la pose accroupie. Les femmes, au contraire de ceux-ci, se trouvaient à l'aise au milieu des exhalaisons bizarres de désinfectant, d'infection et de parfums confondus. En fardant leurs joues et leurs lèvres, elles bavardaient avec moi et traînaient contre l'éventaire de savon, d'ouate, d'épingles que ma mère avait créé.
Attentif, et j'avais promptement acquis un savoir remarquable, je suivais l'évolution tumultueuse des diarrhées ou celle, soupirante, des constipations, jusqu'au froissement de papier de soie annonciateur du dénouement... (...) » (p.70-71)
« (…) Dans un beau mouvement de charité chrétienne, la mère, la brodeuse, vint voir sa fille, l'enfermée. A l'intérieur de la cage obscure, la visiteuse ressentit une grande effervescence intestinale due à la vive émotion. Elle murmura les premiers mots du discours moralisateur et minutieusement préparé :
Ma pauvre fille, je ne te ferai pas de reproches...
La suite ne passa pas entre les grillages fins. Il y eut un déchirement, un brouhaha de pets et de soupirs. La maman éclatait du derrière.
Le tête-à-tête, en ce parloir empuanti, dura le temps réglementaire : une demi-heure.
Oh ! Mon Dieu... Mon Dieu..., disait la vieille dame, par instants et au comble, sans doute aucun, de la confusion.
La fille ne disait rien.
Et la mère partit avec sa harangue rentrée et son caca dans ses jupons blancs et nombreux. Pour ne plus jamais revenir. » (p.24-25)
« (…) Le « lavatory » était un local, au sous-sol, spacieux et illuminé ; ses petits carreaux de faïence blanche, qui recouvraient les murs et scintillaient, me rappelaient les stations du métro de Paris. Le gérant exigeait une propreté flamande. Au cours de ses fréquentes tournées d'inspection, avec l'autorité que confèrent une jaquette noire, un gilet à cœur et un pantalon rayé, il entrait dans chaque cabinet, soulevait le siège, plongeait dans la lunette et flairait, humait, cherchant l'odeur.
Quand il était satisfait de son examen, il partait en déclarant :
« On y mangerait. »
Un connaisseur. (...) » (p.69-70)
Dans ce livre, Calet est en quelque sorte un écrivain dans l'esprit antisocial et individualiste de Georges Darien ou même, d'une certaine manière, Léautaud ; un écrivain qui dénonce l'ignominie de nos comportements de meute, mais n'apporte pas de solution aux problèmes pour la bonne et simple raison qu'il n'en existe aucune.
Le quatrième de couverture a beau le réfuter, pour moi, il y a du Céline dans ce regard noir, à contre-courant, mais il se traduit par des mots différents. Nous ne retrouvons pas dans le style de Calet la logorrhée de Céline, pas plus que les hallucinations et la démesure. Il n'y a pas non plus de violence dans la prose de Calet. Il n'y a donc pas grand-chose de Céline me direz-vous, et pourtant, il y a malgré tout, en filigrane, un semblable dégoût des bassesses humaines, du conformisme écrasant, des vérités toutes faites et jamais vérifiées.
Mais quand Céline dégueule tripes et boyaux le monde et les hommes et se remet les doigts au fond du gosier lorsque plus rien ne semble venir, Henri Calet, lui, vomit ce monde discrètement, presque à l'abri des regards, ses remontées acides lui viennent par petits jets de bile, savamment distillés dans son interprétation faussement innocente, trompeusement apaisée.
Henri Calet est donc un homme mesuré, mais ses mots ne trompent pas pour autant. L'amour, le travail, le patriotisme, la morale, tout y passe, et avec style. Il suffit parfois de cinq ou six mots, une dizaine tout au plus, pour faire passer son message au lecteur. Des exemples ?
« (…) L'amour qu'on fait ne vaut jamais cher. (...) » (p.129)
« (…) Une blague qui n'est pas merdeuse, n'est jamais une bonne blague. » (p.137)
« (…) L'onanisme est un plaisir vraiment gratuit. Le vrai plaisir des solitaires et des pauvres. (...) » (p.150)
Et quand l'écrivain est plus prolixe, on jouit tout autant :
« (…) Les pages d'histoire immortelle, on aime bien les lire, mais les écrire et avec son propre sang c'est, tout de même, un peu différent. (...) » (p.64)
« (…) A seize ans, je faisais des poèmes la fleur aux dents. Comme vous et moi.
Bien droit sur mes pieds, mains aux poches devant un objectif absent, raide et tout verbeux j'entonnais mon cantique à la gloire de la Patrie, de la Nature, de l'Amour.
Au choix.
Le climat était propice à la poussée, au développement de pensées nobles et de sentiments élevés. J'en avais, j'en étais plein, j'en débordais.
D'un côté, les bons ; de l'autre, les méchants. Et pas de pitié pour les méchants !
Mes idées, peu nombreuses, n'étaient pas troubles.
Il a fallu du temps pour que tout sorte. Je veux parler des bonnes vérités et des lieux communs que, pendant des années, j'ai rendu en énorme dégueulade.
Ce qui était entré par l'oreille s'en alla par la bouche.
Personne n'en fut incommodé.
Le sceau de fer, les bonnes souffrances, les vieux messieurs – plus près encore : les w.-c. de l'hôtel. - … Oublié, tout cela. L'ingestion avait été massive et parfaitement assimilée.
Fils respectueux en passe de devenir le bon soldat, l'employé ponctuel, le mari aimant, le père à son tour respecté. Facile. Il ne fallait que suivre. J'étais, on le comprend, un petit bonhomme engagé sur la bonne voie. (...) » (p.103)
« (…) De grandes heures sonnaient à l'horloge de l'Histoire. Pour le retour triomphal des héros, nous étions accrochés sur une échelle à vingt francs et mêlions nos pleurs, ma mère et moi.
Ce fut un défilé mémorable.
En tête, le Roi-Chevalier et la famille royale. Tous à cheval.
« Vive le Roi ! Vive la Reine ! »
Et après, les petits soldats, tous les petits soldats qui restaient.
« Vivent les petits soldats ! »
Suivaient les nègres, les Arabes, les Canadiens, les Portugais...
« Vivent les nègres ! »
Les tanks, les canons...
« Vivent les tanks ! »
A la fin, nous avions la gorge irritée. Dans la soirée, la foule a défoncé les vitrines des vendus notoires et rasé la tête d'une douzaine de prostituées de la rue Saint-Laurent, qui avaient commercé de leurs charmes avec les vaincus. On en a déshabillé quelques-unes en pleine rue. Quelle rigolade !
Des patriotes exaltés opinèrent qu'il eût été bon de les livrer à la flamme purificatrice du bûcher, mais cette idée ne fut pas retenue.
On avait tous avalé le drapeau, avec la hampe. » (p.106-107)
« (…) A l'ombre des anciens combattants de retour au foyer, les nouvelles couches rampèrent, poussèrent et s'exténuèrent en cris admiratifs.
Il était de bon ton de s'excuser, en manière de préambule :
Je suis, je le sais, un peu jeune...
Pour un oui et pour un non, à tout bout de champ, ils nous mettaient sous le nez leurs médailles et leurs rubans. Nous dûmes écouter leurs récits de pluies de balles, de nappes de gaz, de marmitages et d'heures « H », qu'ils avaient sur le bout de la langue et que nous eûmes bientôt sur le bout des doigts.
Et par dessus la tête. (...) » (p.109-110)
« (…) C'est dans les salles de cinéma que, chaque semaine, j'allais faire ma provision de femmes. Pour mes nuits.
Un petit billet pour un petit jeune homme.
Muets, coulaient en épisodes hebdomadaires, Judex et le Masque aux dents blanches. Et les premiers petits Chaplin, dont on ne nous avait pas dit encore qu'il était génial. (...) » (p.113)
« (…) J'ai été chercher le travail qu'on rencontrait alors dans tous les coins. Notre pauvre France vivait des jours de prospérité.
Au fond d'un faubourg, près de la Seine, j'ai lu les ardoises accrochées...
« On demande... »
La fabrique de cirage « Kibrill » demandait. Je suis entré pour voir si l'on ne voulait pas d'un petit apprenti désireux de participer à la symphonie du Travail. » (p.138-139)
« (…) A sept heure du matin, la sirène chantait trois fois et nous accourions. Roues, tours, volants, bielles, fraiseuses, courroies, perceuses se mettaient en branle, sous la verrière.
Nous aussi.
Pendant huit heures et souvent plus. (…) » (p.140)
« (…) Quant à ma conscience, elle était devenue totalement aphone.
J'étais dans le chemin des pauvres.
« Poussez pas et suivez la foule. » (...) » (p.141)
« (…) Comme les autres, lavé, peigné, torché, je suivis ma petite route immonde, sous la ville dans le convoi de huit heures et demie des vendeurs, vendeuses, comptables et dactylos dirigés sur les piles de madapolam et les additions du Grand Livre. (...) » (p.167)
Calet aime aussi jouer avec la langue pour exposer son point de vue. Les expressions toutes faites sont une source presque inépuisable en la matière :
« De bonne heure, quand elle n'est pas bonne, il fallait se décoller les yeux pour entrer dans la gueule du loup du commencement d'un jour. » (p.150)
Il y a chez Calet, comme chez Céline, un goût prononcé pour le scatologique, de ses allégories et évocations merdeuses, comme Céline une fois de plus, Calet s'appuie pour remettre l'homme à sa place, dans toute son absurdité, et l'insignifiance de sa condition :
« (…) C'était une allée et venue de gens pressés et soucieux dans un bruit de ventres libérés et d'eau qui s'échappe, en trombe. Les clients avaient une tendance commune à s'enfuir de façon furtive sans attendre le coup de brosse qui fait venir le pourboire dans la soucoupe réservé à son usage.
Les hommes semblaient impatients de retrouver dehors le sentiment de leur valeur, un instant perdue dans la pose accroupie. Les femmes, au contraire de ceux-ci, se trouvaient à l'aise au milieu des exhalaisons bizarres de désinfectant, d'infection et de parfums confondus. En fardant leurs joues et leurs lèvres, elles bavardaient avec moi et traînaient contre l'éventaire de savon, d'ouate, d'épingles que ma mère avait créé.
Attentif, et j'avais promptement acquis un savoir remarquable, je suivais l'évolution tumultueuse des diarrhées ou celle, soupirante, des constipations, jusqu'au froissement de papier de soie annonciateur du dénouement... (...) » (p.70-71)
« (…) Dans un beau mouvement de charité chrétienne, la mère, la brodeuse, vint voir sa fille, l'enfermée. A l'intérieur de la cage obscure, la visiteuse ressentit une grande effervescence intestinale due à la vive émotion. Elle murmura les premiers mots du discours moralisateur et minutieusement préparé :
Ma pauvre fille, je ne te ferai pas de reproches...
La suite ne passa pas entre les grillages fins. Il y eut un déchirement, un brouhaha de pets et de soupirs. La maman éclatait du derrière.
Le tête-à-tête, en ce parloir empuanti, dura le temps réglementaire : une demi-heure.
Oh ! Mon Dieu... Mon Dieu..., disait la vieille dame, par instants et au comble, sans doute aucun, de la confusion.
La fille ne disait rien.
Et la mère partit avec sa harangue rentrée et son caca dans ses jupons blancs et nombreux. Pour ne plus jamais revenir. » (p.24-25)
« (…) Le « lavatory » était un local, au sous-sol, spacieux et illuminé ; ses petits carreaux de faïence blanche, qui recouvraient les murs et scintillaient, me rappelaient les stations du métro de Paris. Le gérant exigeait une propreté flamande. Au cours de ses fréquentes tournées d'inspection, avec l'autorité que confèrent une jaquette noire, un gilet à cœur et un pantalon rayé, il entrait dans chaque cabinet, soulevait le siège, plongeait dans la lunette et flairait, humait, cherchant l'odeur.
Quand il était satisfait de son examen, il partait en déclarant :
« On y mangerait. »
Un connaisseur. (...) » (p.69-70)
Dans ce livre, Calet est en quelque sorte un écrivain dans l'esprit antisocial et individualiste de Georges Darien ou même, d'une certaine manière, Léautaud ; un écrivain qui dénonce l'ignominie de nos comportements de meute, mais n'apporte pas de solution aux problèmes pour la bonne et simple raison qu'il n'en existe aucune.
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