Il y a longtemps que je voulais découvrir la culture indienne à travers sa littérature. En fouinant un peu, on se rend compte que les auteurs issus du peuple natif des États-Unis ne manquent pas, et parmi eux, Sherman Alexie s’est rapidement fait remarquer comme l’un des plus prometteurs de la jeune génération. Publié en 1995 alors qu’il n’avait pas encore trente ans, Indian Blues est probablement son roman le plus célèbre à ce jour, Sherman Alexie y narre l’histoire d’un groupe de jeunes indiens de la tribu Spokane en quête de repères et de considération.
Bien que mettant avant tout l’accent sur un univers fantasmagorique où la spiritualité indienne et notamment les rêves des différents personnages tiennent une large place, et où les clins d’œil à l’Histoire des États-Unis et à la culture musicale du pays sont légion, Sherman Alexie enrichit son texte de sa propre expérience de la vie dans les réserves. Alexie a grandi dans les lieux où il campe son histoire, il est donc bien placé pour décrire cet univers déstabilisant, où son peuple jadis si fier est aujourd’hui réduit à la mendicité, à une misère tant matérielle que spirituelle. C’est cet aspect du roman qui me semble le plus intéressant, sa facette allégorique m’échappant un peu plus. Il faut dire que l’auteur est parfois un peu difficile à suivre pour un esprit vaguement cartésien, entre la résurrection du bluesman Robert Johnson, et des généraux massacreurs d’indiens Sheridan et Wright recyclés en dénicheurs de talents d’une maison de disques new-yorkaise, on ne voit pas toujours ce que Sherman Alexie souhaite exprimer (du moins, je ne vois pas très bien). C’est en tout cas dans cet univers ambivalent, entre fantaisie et réalisme, qu’évoluent Thomas, Victor et Junior, trois Spokanes paumés (pléonasme ?) – rejoints plus tard par les sœurs Warm Water de la réserve voisine des Flatheads - dont le destin est bouleversé par l’apparition de Robert Johnson et de sa guitare « un peu » particulière. De là naît l’ambition de sortir de la misère et de l’indifférence par la musique, Thomas forme les Coyote Springs, un groupe de rock qui ne tarde pas à faire parler de lui, et à susciter des réactions diverses au sein de la communauté spokane.
Ce qui aurait pu faire une banale et barbante « success story » à l’américaine prend la forme d’une histoire tragique assez touchante. On découvre tout au long du roman des personnages plus complexes qu’il n’y paraît de prime abord, le parcours de chacun donnant des réponses à ce qu’ils sont devenus humainement et socialement. La mort et la violence les suivent depuis leur plus « tendre » enfance, comme Victor, le trublion de la bande, marqué à vie par les abus d’un prêtre pédophile en colonie de vacances.
On découvre aussi des personnages annexes souvent attachants, comme le paisible mais omniprésent « homme-qui-était-probablement-Lakota » dont la principale fonction dans la réserve est d’annoncer inlassablement, jour après jour, l’imminente fin du monde, ou encore Simon, un bon bougre qui exprime quant à lui ses névroses au volant de son pick-up qu’il conduit exclusivement en marche arrière. Et puis il y a tous les autres membres de la communauté, ravagés par l’alcoolisme ou par une pratique religieuse au pied de la lettre, héritage des Blancs qui divise plus les membres de la tribu qu’il ne les rassemble, entre les différentes églises représentées.
Tout au long du roman, mais sans misérabilisme, Alexie illustre le malaise d’être Indien dans un monde qui les a oubliés après les avoir quasiment anéantis. Un peuple détroussé de sa culture, de sa dignité, et dont les générations actuelles semblent toujours incapables de se situer entre le monde des Blancs et celui de leurs ancêtres.
« (…) - Y’a des jours où je ne supporte pas d’être indienne, dit Checkers
- Ce serait pas ça, le véritable test ? demande sa sœur. On n’est pas vraiment indien tant qu’à un moment de sa vie on n’a pas regretté de l’être ? (…) »
Bien que mettant avant tout l’accent sur un univers fantasmagorique où la spiritualité indienne et notamment les rêves des différents personnages tiennent une large place, et où les clins d’œil à l’Histoire des États-Unis et à la culture musicale du pays sont légion, Sherman Alexie enrichit son texte de sa propre expérience de la vie dans les réserves. Alexie a grandi dans les lieux où il campe son histoire, il est donc bien placé pour décrire cet univers déstabilisant, où son peuple jadis si fier est aujourd’hui réduit à la mendicité, à une misère tant matérielle que spirituelle. C’est cet aspect du roman qui me semble le plus intéressant, sa facette allégorique m’échappant un peu plus. Il faut dire que l’auteur est parfois un peu difficile à suivre pour un esprit vaguement cartésien, entre la résurrection du bluesman Robert Johnson, et des généraux massacreurs d’indiens Sheridan et Wright recyclés en dénicheurs de talents d’une maison de disques new-yorkaise, on ne voit pas toujours ce que Sherman Alexie souhaite exprimer (du moins, je ne vois pas très bien). C’est en tout cas dans cet univers ambivalent, entre fantaisie et réalisme, qu’évoluent Thomas, Victor et Junior, trois Spokanes paumés (pléonasme ?) – rejoints plus tard par les sœurs Warm Water de la réserve voisine des Flatheads - dont le destin est bouleversé par l’apparition de Robert Johnson et de sa guitare « un peu » particulière. De là naît l’ambition de sortir de la misère et de l’indifférence par la musique, Thomas forme les Coyote Springs, un groupe de rock qui ne tarde pas à faire parler de lui, et à susciter des réactions diverses au sein de la communauté spokane.
Ce qui aurait pu faire une banale et barbante « success story » à l’américaine prend la forme d’une histoire tragique assez touchante. On découvre tout au long du roman des personnages plus complexes qu’il n’y paraît de prime abord, le parcours de chacun donnant des réponses à ce qu’ils sont devenus humainement et socialement. La mort et la violence les suivent depuis leur plus « tendre » enfance, comme Victor, le trublion de la bande, marqué à vie par les abus d’un prêtre pédophile en colonie de vacances.
On découvre aussi des personnages annexes souvent attachants, comme le paisible mais omniprésent « homme-qui-était-probablement-Lakota » dont la principale fonction dans la réserve est d’annoncer inlassablement, jour après jour, l’imminente fin du monde, ou encore Simon, un bon bougre qui exprime quant à lui ses névroses au volant de son pick-up qu’il conduit exclusivement en marche arrière. Et puis il y a tous les autres membres de la communauté, ravagés par l’alcoolisme ou par une pratique religieuse au pied de la lettre, héritage des Blancs qui divise plus les membres de la tribu qu’il ne les rassemble, entre les différentes églises représentées.
Tout au long du roman, mais sans misérabilisme, Alexie illustre le malaise d’être Indien dans un monde qui les a oubliés après les avoir quasiment anéantis. Un peuple détroussé de sa culture, de sa dignité, et dont les générations actuelles semblent toujours incapables de se situer entre le monde des Blancs et celui de leurs ancêtres.
« (…) - Y’a des jours où je ne supporte pas d’être indienne, dit Checkers
- Ce serait pas ça, le véritable test ? demande sa sœur. On n’est pas vraiment indien tant qu’à un moment de sa vie on n’a pas regretté de l’être ? (…) »
« (…) Les Blanches, Junior le savait parfaitement, représentaient des trophées pour les jeunes Indiens. Il avait toujours pensé que se faire une Blanche, c’était comme compter un coup ou voler des chevaux, la plus éclatante des revanches contre les Blancs.
Hé ! disaient ainsi les Indiens aux Blancs. Vous nous avez peut-être flanqué la pilule pendant les guerres indiennes, mais maintenant, on se tape vos femmes ! (…) »
Hé ! disaient ainsi les Indiens aux Blancs. Vous nous avez peut-être flanqué la pilule pendant les guerres indiennes, mais maintenant, on se tape vos femmes ! (…) »
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